Nora est ce genre de fille qui ne fait jamais de vagues. Sage, très sage, elle est réfléchie et posée, et si naturelle. Nora, c'est le genre de jeune femme que n'importe qui rêverait d'avoir comme femme : excellente cuisinière, sportive et compréhensive, que rêver de mieux ? Et pourtant, la demoiselle ne peut supporter le bruit et toutes les personnes trop impulsives. Elle se contente de les ignorer, de les inviter sans un mot. Car, de toute manière, elle n'a jamais aimé parler. Les mots, elle les aime tout autant qu'elle les maîtrise, car elle aime les histoires, les jolies lettres. Cependant, elle sait ce que peut produire la morsure de ceux-ci et les redoute quelque peu...

Née en Californie, Nora ne connaissait donc rien du monde d'Aster, mais elle en rêvait. Oui, elle rêvait d'un grand royaume, de magicien et de princesse en détresse. Mais elle n'en parlait pas, vivait paisiblement, sans doute trop paisiblement... Longtemps admirée de ses camarades de par son son air de femme et son caractère, jamais sa scolarité ne lui fut désagréable. Ce qui provoqua sa rupture avec cette vie tranquille, ce fut son père. Armé de mots, il la brisait intérieurement. Celui-ci était écrivain, maniant les mots comme personne, les aimant plus que tout, bien trop. Divorcé déjà, d'une mère peu aimante, il dut élever sa fille seul. Mais les moyens lui manquaient. Aussi, comme personne ne pouvait l'aider, il prit sa fille comme bouc-émissaire. Il la délaissait. Et lorsqu'un jour elle s’avança pour le rattraper, pour faire partie de son monde, il la brisa. Rejetant violemment cet être imparfait, cet être de chair et non d'encre et de papier. Nora se referma sur elle-même, manifestant rarement de la joie pure et réelle. Elle était comme enfermée dans un livre dont l'auteur n'aurait pas désirée faire d'elle un personne heureux. Et puis, un jour, elle trouva ce miroir, et le monde dont elle avait toujours rêvé apparut devant elle.

Kaïs lui raconte les histoires de son royaume, et Nora l'écoute, telle est leur relation. La présence de la jeune femme à ses côtés la fait se sentir en sécurité, et elle n'a pas peur de ses paroles, de ses actes. Et puis, Nora l'admire, elle, qui peut utiliser cette magie que son corps ne pourrait contenir.

Il choisit ses mots, elle ne sait pas si elle doit l'admirer, l'aimer ou avoir peur de ce jeune homme. Il semble perdu dans un autre monde, tout comme elle a atterrit dans le sien. Elle se sent proche de lui, sans que lui ne prenne réellement conscience de sa présence. Ils s'entendraient sans doute merveilleusement bien, tout comme leurs paroles pourraient les faire se haïr.